Je ne veux pas revenir. C'est si doux de partir, je ne connais rien de plus beau. Mais il faut toujours revenir. Je ne veux pas revenir! On vous fais croire à un atterrissage en douceur, on vous sourit, on vous parle, on vous caresse. On enduit vos ailes de marée noires! Voilà , on roule tout ce qui vole encore dans vos têtes dans le cambouit!On le déchire,on le malaxe si bien qu'il ressemble à ces gros boudins noirs plein de sang de bêtes.Et on vous le fait ravaler. On vous fais ravaler des batements d'ailes sanglants, roulés dans du cambouit.Et c'est dégeulasse, c'est vraiment dégeulasse ! Et on doit mâcher sans rien dire. Et je dois mâcher sans rien dire. Et je ne peux surtout pas pleurer parce qu'ils me regardent. Ils glaviottent tous de rires gras. C'est vrai, rien n'est triste. On bouffe bien ici et tout le monde à le ventre rond. De gros poings martellent la table et ma pauvre tête, comme si elles n'étaient pas encore assez plates. Et ils rigolent tant et si bien qu'ils me crachent sur la joue. C'est le seul moment où il est possible de pleurer, ça ne se verra pas . C'est ridicule, pauvre petite chose démunit qui a envie de pleurer c'est si ridicule qu'on lui recracherait dessus, moi la première. Mes paupières passent vite la serpière. Avant que tout croupissent sur le bord de mes yeux.Tous mes petits rêves pèsent très lourds sur mes paupières, fatiguées de passer la serpière. Ils rampent parterre. Oui, il préfèrent encore devenir des vers-de-terre. Ils se cachent, surtout ne pas se faire répérer, surtout pas. Je les vois ramper. C'est finit, je les vois ramper. Je suis revenue. Ils laissent une trace gluante derrière eux, en se mouvant de façon obscène. Ils sont si laids. Ils sont immondes. Et je le sais, je suis immonde..Je me mords très fort les doigts, pour ne pas voir ça. Et mes doigts rampent sur mes lèvres et sur mes dents, délivrant un liquide rouge et gluant. C'est si affreux ce que l'on mange ici! Je ne peux plus rester! je lèves les yeux au ciel! Quelle conne! NAN ! Quelle conne ! Je vois le dernier oiseau blanc qui jaillit de mes yeux. Il s'envolle vite par la fenêtre. Une main vive d'habituée ressert sa grosse poigne autour de son cou. J''entends l'oiseau pousser des cris tonitruants. Je prie pour que l'on me crache à nouveau sur la joue, que je puisse pleurer tout mon saoul. J'entends le bruit de la hâche sur son cou blanc. J'entends la carcasse qui cède. On le farcit de marrée noire lui aussi. Demain, il y aura un fameux festin et je me régalerai ici bas puisque je ne repartirai plus jamais.