Samedi 14 janvier 2012 à 17:44

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Le sifflement de la flûte de Pan
Me rappelle le temps 
où les feuilles tombant
s'en revenaient tournoyant
A la boîte de Pandore

Ces saisons de cuivre
et d'or des premiers 
âges d'or où l'eau qui dort
Sortait à peine de sa source
Et où la nature rousse
Semblait s'éveiller encore
Pour la première fois

Suivant le mouvement
Contraire à ses lois
Rajeunissant en revenant
sur ses pas.

Samedi 14 janvier 2012 à 16:07

   
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 J'avais tenté, sinon d'excuser, du moins de donner un sens à ce que j'avais perçu, plus tard, lorsque j'étais en âge d'analyser et de comprendre, comme une vanité honteuse, comme l'étalage impudique d'une bêtise, non pas naïve, mais perverse et narcissique. J'avais voilé ce que le naturel de l'enfance laisse lire avec une transparence dangereuse et dont j'avais honte d'avoir donné le spectacle; j'en faisais le fumier terreux nécessaire à l'élévation d'une plante majestueuse dont ma conscience était le tuteur scrupuleux.

    C'est alors que le témoignage, involontaire et inattendu,  d'un être que j'avais connu dans ma prime enfance et qui me fut cher, me révéla, sans prendre conscience de l'émotion qu'il me procurait, que cette analyse que j'avais faite de moi-même et conservée comme véritable et catégorique, était peut-être fausse. 
   
    C'est avec un bonheur étrange et profond que j'entendais relater cette anecdote du passé que j'avais oubliée et qui ébranlait les certitudes douloureuses de plusieurs années en détruisant d'une pichenette ce que je croyais avoir construit pierre à pierre comme la morale qui m'élevait péniblement au rang des gens de biens. Je souriais de cette vanité, qui n'était pas là où je la dénonçais, qui m'avait fait croire que ma seule conscience avait fait de moi la personne que je suis, après un apprentissage pénible. Je retrouvais dans ces paroles naïves et transparentes qu'elle me répétait, les mots mêmes qui auraient pu être les miens aujourd'hui, en une abolition vertigineuse du temps. Je fus, en fait, quelqu'un de naturellement bon, et c'était bien risible vanité que l'acharnement que j'avais mis en ma soit-disant repentance.

Mercredi 11 janvier 2012 à 11:48

   
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    Il s'agissait d'arborer, de porter au doigt, sur la main, la preuve rassurante d'une appartenance au monde des hommes, au monde civilisé.

   Témoignage discret mais toujours visible qui rassure l'oeil de l'autre, inquisiteur furtif, et qui fait ressentir à celui qui regarde cet inexplicable soulagement de savoir autrui le libre aliéné d'un autre, d'un tiers, qui est l'ancre et le maître, qui le retient par cette discrète laisse, par cette chaîne fine, qui orne en même temps qu'elle tient; de savoir autrui un égal dans la faiblesse. Ces limites, qui le font l'esclave d'un autre et le maintiennent à une distance respectueuse de nous, cette distance, lui confèrent en même temps la dignité du mystère tissé par l'intimité du lien, intimité dont nous sommes exclus et qui nous renvoie à la sagesse de notre propre réserve et au confinement de notre propre intimité pour mieux respecter en autrui celui dont la sagesse accepte la barrière symbolique par une soumission raisonnable et réciproque. Réciproque car ce lien qui le fait esclave le fait en même temps maître et le rend digne à nos yeux non seulement d'avoir été choisi mais d'avoir un pouvoir qui lui permet une domination symbolique sur un autre, sur l'être intime qui lui appartient.

   C'est cela que nous cherchons sur la main d'autrui, comme le signe de reconnaissance d'un semblable, qui n'est pas farouche ni dangereux, et qui respecte les mêmes lois que nous, qui appartient au même univers de valeurs, comme un papier d'identité qui attesterait d'une nationalité commune et dissiperait le doute d'un exotisme malsain et redouté. 

   De la vue de mains moins fermes, se marquant doucement de l'empreinte des âges, et désespérément nues, naît l'inquiétude d'avoir face à soi un marginal, un vagabond, un homme dangereusement détaché de la société des hommes, un être dont l'errance ne connaît pas de point d'ancrage ni de limites; un rebus que personne n'a choisi, que personne n'a voulu, un faible qui n'a su marquer de sa domination aucun individu, un pervers ou un libertin, incapable par sa raison défaillante d'établir un commerce sage avec autrui, un lien de confiance, et dont les amours dévorantes et dangereuses se développent et courent dans l'ombre en de menaçantes ramifications souterraines.  

   L'homme perdu, pressé, se jette haletant dans cette aliénation qui l'apaise et le rassure qui, espère t-il, lui donnera une place à lui sur terre. Et, trop tard, son vieil instinct réveillé, il prend conscience qu'il s'est attaché, ligoté, à une place qui n'est pas la sienne, qu'il ne veut pas accepter comme la sienne. Il brise alors la chaîne, cause de son tourment, non par une force remarquable qui le rendrait capable de se délivrer de ce qui jadis l'aliénait, mais seulement par la rupture de l'illusion de la puissance des maillons, qui rend dangereusement caduc ce lien symbolique.
   Il me parle de liberté, d'une vie à refaire, rêvant à travers moi la jeunesse du commencement, tout en espérant secrètement l'avènement de la mère sage, tandis que je berce sur mes genoux ses enfants, fruits ineffaçables, irréductibles, du lien brisé d'antan, dont on voudrait déjà ignorer l'arbre qui doit encore les supporter.

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