Mardi 25 août 2009 à 11:30

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 Je dois renoncer à mes rêves de "réussite", comme on dit de manière pompeuse. Il s'agit pourtant juste d'un désir de liberté et d'indépendance.
Mais il faut renoncer encore, dépassée par la nécessité de l'alliance.
Renoncer à être le seul maître de soi , renoncer à se suffire à soi même pour parvenir à ses fins. Et accepter enfin, ces petites conditions, ces petites concessions, devant lesquelles on s'était juré de ne pas céder.
L'obligation de l'alliance : le mariage sans doute, l'obligation de pondre qui s'en suivra... Et sentir, malgré l'aspiration, malgré les efforts fournis pour la liberté, pour la contemplation libre, le retour à un cycle animal. Forcée d'abandonner cette sphère d'oisiveté où la sensibilité décuplée était le nid de l'imagination, de la création, de la sensualité. S'abandonner sans forces au cycle vital : travailler pour se nourrir, nourrir et se nourrir, astiquer, procréer et recommencer, sans émotions pour rien.

Mercredi 19 août 2009 à 20:00



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Cette pulsion soudaine du corps  vers un objet. Le corps prend la parole, prend les commandes, mais il ne peut pas réfléchir il agit tout de suite. Il veut il prend.
On parle de pulsion, parce-que ça se dit, ça se fait, c'est un mot qui trouve facilement sa place. C'est un mot choque, qu'on emploi souvent parce-que ça fait de l'effet. Mais c'est pas ça. C'est pas si molasse que ce que ça qualifie dans le quotidien. 

Je l'utilise je l'ai utilisé, c'est un mot courant. Mais là, maintenant, en ce moment je veux dire, je ne le prononce plus, parce-que je ne le pense plus. Il a prit sa signification dans mon corps. Et je sens cette déchirure de la chaire. Ce n'est pas un frisson que l'esprit guide, amplifie, autorise. C'est une violence animale. Un peu, peut-être, comme quand, excédé de démangeaison, on se gratte sans réfléchir jusqu'au sang. C'est un réel besoin, une parfaite nécessité, que le corps doit accomplir, même si l'esprit ,baillonné, s'y serait formellement opposé, devinant un mal futur grâce à ses connaissances.

Mais le problème, c'est qu'on est pas des animaux. Je veux dire, on se rend compte. On se rend compte qu'il ne faut surtout pas perdre le contrôle, faire n'importe quoi, ne plus suivre le code sur le quel on base tout notre être. Enfin, ne pas s'anéantir. Là, on a tous une réflexion monarchique, tout de suite : donner les pleins pouvoirs à notre tête. Qu'elle soit despote s'il le faut pour maintenir l'unité, l'ordre, qu'elle nous épargne le ridicule, la négation de nous même, de nos principes, de ce qu'on a construit jusqu'ici avec elle. 

D'autre part, il y a cette nature de gens, qui restent parfois sans bouger un moment, parce-que tout une affaire minutieuse de classement s' effectue dans leur esprit. Ces gens qui aiment savoir, contrôler, l'inclination de leur tête, le balancement de leurs bras. Cette nature cérébrale qui a oublié qu'elle était animale, animale d'abord, et qui, de toute manière, n'aime pas trop se le rappeler. Cette nature ne m'est pas inconnue. Elle ne m'est pas moins inconnue que la nature violente de l'homme qui a gardé le besoin de posséder, le désir du prédateur, l'élan brutal et inconscient de la vie. 

Et il n'y a rien de plus terrible que cette tyrannie : la rigueur cérébrale de la bonne éducation, de l'enseignement des moeurs d'une société, face à une nature impérieuse et vibrante, foyer de cette pulsion violente.

Voilà, je dois le dire, puisqu'il faut parler de soit sans faire semblant, au-delà de ces généralités. Je dois dire que j'ai senti pour la première fois que mon corps demandait et qu'il avait énormément envie, au delà des répugnances de la réflexion, au delà de ce qui est décent et de ce qui me plaît d'habitude. L'esprit n'était plus ce qui pousse le corps dans ses choix, ce qui le nourrit. Et le corps n'était plus celui qui mange avidement. Il ne s'agissait plus que le corps accepte, que le corps se donne, parce-que l'objet est apprécié selon les stricts critères de l'esprit.
 
 La puissance de cette envie, de cette pulsion, mon corps l'a articulé d'une manière telle que l'ordre n'aurait pas été mieux invectivé par mon esprit. Et je l'aurai suivit aussi naturellement que la main saisit un verre d'eau quand l'esprit, en une fraction de seconde, l'ordonne. On ne doute pas qu'il faille le faire. Le lendemain j'avais la migraine tant l'imagination s'était mêlée de ces affaires corporelles. L'objet désiré s'est littéralement brisé. Je ne regrette pas son auto destruction salvatrice car véritablement le corps ne se serait pas soumis.

Vendredi 14 août 2009 à 20:30


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 Se laisser aller à des petites bontés polies et qui ne coûtent rien, qui ne sont en fait qu'une lâcheté pour flatter son orgueil.

Enlacer avec fougue ceux qu'on apprécie mais qu'on sait seulement de passage.

Ne pas embrasser, ne pas continuellement chercher à plaire, à ceux dont l'étreinte fraternel est celle du sang et dont l'amour est définitivement inscrit dans la chair.

Pardonner aux autres leur plus grandes fautes, accepter d'en être salit, par dédain, par connaissance de leur médiocrité et de sa supériorité absolue.

Etre intransigeant pour ceux qui ont commis une erreur, et que, pourtant, on jugeait  exceptionnels et dignes d'une confiance infinie : une épaule qui cède et sur laquelle on avait  eut la faiblesse de poser la tête. Se détester, finalement, à travers celui qui possédait une part de soi. Se maudire d'avoir cédé et  se  promettre de mieux se barricader en soi.

Crier  sa sympathie au bonheur de celui-là , dont l'idée de la joie nous réjouit. Mais pourtant se taire, trop ému et trop fier quand le succès d'un aimé nous saisi les sens.; bredouiller quelques paroles pleines d'humilité, comme s'il s'agissait de soi, que l'on était gêné.

Abandonner quelques gentillesses mielleuses à ceux qu'on repousse et qui déplaisent, comme un vernis dégoulinant et dégoûtant pour les engluer dans leur médiocrité, enfin nous séparer d'eux. 

Feindre le dédain, le mépris ou le dégoût, pour des voleurs, des bons à rien- dit-on - bien trop aptes à saisir le coeur. Feindre de se le laisser dérober par besoins d'émotions, se persuadant qu'on en reste le seul maître.

Grimacer, minauder, geindre pour de petits soucis coquets, pour des problèmes à la mode. Et vivre en silence et sans larmes les douleurs les plus lourdes et les plus pénétrantes.

Cacher sous mille glaces polies et brillantes le feu ardent de son tempérament, l'emportement secret de sa nature.

Enfin, surtout ne pas paraître exactement soi, fausser les pistes. Livrer une fausse proie aux charognards. Pour garder encore un peu la seule chose que nous possédons vraiment.  Ne pas offrir aux pillages le trésor du fort intérieur. Ne pas donner à l'usure du temps, à la bave des langues, à l'obscénité des regards, l'intimité profonde et fragile, l'unique bien. Jouir seul de ce secret intimement gardé aux confins de soi et se sentir riche de quelque chose.

Jeudi 13 août 2009 à 14:53


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 Je l'ai retrouvé enfin cette photo, celle dont la voix off  caressante parlait. Le morceau dure une minute. Non, moins. C'est terrible. Et pourtant cela suffit pour que l'esprit esquisse la pièce, la fille à l'intérieur, le mobilier simple, la chaleur dehors... Sans pourtant pouvoir saisir pleinement l'image et percer l'atmosphère secrète du lieu.

 C'est juste la chaleur floue, la lumière d'un soleil de plomb qui se glisse sous les volets, un après-midi d'été quelques années avant  69.  Il semblerait que la fille n'ait pas de visage. Est-ce qu' elle sourit? Et son corps? On ne sait pas encore. Elle est juste là, à la machine à écrire. On brouille jusqu'à son identité sexuelle.

 Cette photo est sur l'arrière de la jaquette du disque de l'artiste. Il n'est pas sur la photo. Il n'est pas non plus le photographe. 

J'ai retrouvé la photo. Il y a un article dessous... une bribe de conversation. Caroline dit que cette fille est la maîtresse de Cohen. Il l'a connu bien avant cet album, il l'a connu bien avant d'être connu. Peut-être pour la remercier; peut-être que c'est cet été avec elle, cette chambre là qui sont à l'origine de l'album.  
Elle dit que c'est sa secrétaire et qu' "en fait il doit lui dicter Beautiful Loser, le livre qu'il écrivait à l'époque".
Il sont sur l'île grecque d'Hydra.

Quand l'album est sortit, ça été un succès retentissant. Mais beaucoup, le clamant ou préférant le garder comme un secret intime, auraient acheté l'album pour le charme énigmatique de la photo de la jaquette.
Le compagnon de Caroline dira : "La photo au dos est superbe. Je crois que j'aime autant ce disque pour la photo que pour la musique." 
Caroline y voit un simple fantasme masculin pour une blonde drapée dans une petite serviette, à l'intérieur d'une pièce presque nue.

Et elle se trompe.

La voix off dans ce disque de Delerm explique que la photo est l'objet d'une incroyable méprise :



"Et le type expliquera que la fille en photo à l'arrière de "Songs from a room" n'est pas du tout celle avec laquelle Léonard Cohen vivait à l'époque, que c'était juste une amie du photographe et que Cohen aimait bien cette image, que ça n'a pas été pris début août dans une maison du sud de la France, mais à dix kilomètres de Los Angeles, que la fille ne sait même pas faire marcher la machine à écrire sur laquelle elle a l'air de taper une nouvelle de deux pages, derrière les volets fermés, pendant le cagnard de quinze heures, Que la photo a été prise un matin début mars, que c'est marrant d'avoir pensé que Cohen avait fait l'amour avec elle, juste avant de prendre la photo, parce que c'est une fille qui n'aime que les filles." 

On peut voir à présent, sur la photo, la fille qui sourit au photographe. Mais  son nom ? Cohen ne la connaissait peut-être pas finalement.  
Un jour, des années après, alors qu'elle cherchait un cd tout autre, elle est peut-être tombée sur cet album où figure sa propre photo. Et elle a peut-être trouvé cela aussi mystérieux et inexplicable que tous ceux qui se sont penchés sur cette photo. Et ce jour là, elle n'était certainement ni à Hydra, ni vers Los Angeles, ni dans le sud de la France. 
Sûrement que si elle savait tous les doutes et les suppostions qui roulent sur ce fragment de son passé elle rirait.





Lundi 10 août 2009 à 19:05


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 T'es mignonne mais t'es un gros bébé et personne ici n'est ta maman. Personne ici ne peut te transmettre quoi que ce soit qui te fasse grandir. Personne n'a les bras moins chétifs que les tiens, pour te soulever, pour te porter, pour te bercer.
 Tu me plais avec tes rêves de princesse, tu me plais avec ton esprit oisif et sentimental, mais j'en ai plein les bras de moi, tu as beau devenir de plus en plus maigre, je ne te soulèverai pas.  Je ne te porterai pas en moi comme un parasite. 

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