Que de pupilles vierges, 'faudra pas que je loupe le dessin que j'ferrai dans leurs yeux. Je suis heureuse de ces premières ébauches que j'ai tracé à main levée et dont tes yeux me renvoient le reflet prometeur. Mais vois-tu, une rature me serait fatale et creverait d'un coup de mine la douce harmonie dont je gonfle tes globes occulaires, je sais à quel point tes espoirs sont fragiles. Il y a cette oeuvre ratée qui avait pourtant si bien commencée, j'avais prévue des dimensions faramineuses tant je croyais large la visions des choses de ces grands yeux marrons. Mais comment voulez-vous dessiner sur du papier mâché par la mastication des autres. Et oui, certains font de leurs yeux un bien communautaire. Il y a des communautées cyclopes qui regardent toutes par le même oeil. Han tes grands yeux marrons j'ai déjà songé à les chiffonner dans leurs paupières et à tout recommencé; mais à présent je suis une artiste trop occupée pour m'appitoyer sur mes râtés. Et puis il y a ces oeuvres que l'on croit toujours avoir achevé, dont a exploré jusqu'au fond des pupilles, armé de notre palette, et dont on a orné finement l'iris de toutes les facettes de notre personalité; ces chefs-d'oeuvre qui nous rassure sur notre talent. Ils sont tellement plein de perfection que l'on peinerait à y voir cette petite tâche d'huile anodine qui se répend doucement et qui détruit peu à peu l'éclat de chaque couleur. Il ne faudrait pas laisser s'éffriter ces belles oeuvres, il faudrait toujours les protéger, les mettre sous verre. Ne vous demandez plus pourquoi tant de mes amis portent des lunettes!